Langage non-verbal : la synergologie est-elle une science ?

La synergologie, souvent présentée comme une science de l’interprétation des gestes et des expressions faciales, prétend décoder le langage corporel pour révéler les pensées et les émotions cachées.

Inventée dans les années 1990 par Philippe Turchet, un spécialiste autoproclamé en communication non verbale, la synergologie attire l’attention de nombreuses personnes intéressées par la communication, notamment dans les domaines du recrutement, des interrogatoires policiers et des négociations.

Pourtant, en dépit de ses prétentions, cette approche ne repose sur aucune base scientifique rigoureuse et soulève de sérieuses questions quant à son efficacité et à son éthique.

Les origines et les principes de la synergologie

Philippe Turchet élabore la synergologie dans l’idée de proposer un outil permettant de lire les émotions et les intentions d’autrui à travers leurs gestes et micro-expressions. Selon cette théorie, le corps trahit les pensées cachées et les synergologues prétendent pouvoir analyser ces signaux pour en tirer des conclusions sur ce que ressent ou pense une personne, souvent en dépit de ce qu’elle exprime verbalement. La popularité de la synergologie tient en partie à la fascination qu’exerce le langage corporel dans une société où la communication non verbale est omniprésente.

Il est tentant de croire qu’il existe une méthode fiable pour décoder ces signes silencieux. Les gens, qu’ils soient recruteurs, policiers ou même simples curieux, sont attirés par l’idée d’avoir un « accès privilégié » aux pensées des autres, d’autant plus dans des situations où les enjeux sont élevés.

Les limites et les dangers de la synergologie

Le principal problème de la synergologie est son absence de fondement scientifique. Les études sur le langage corporel existent bel et bien, mais elles sont beaucoup plus nuancées que ce que la synergologie laisse entendre. Les gestes et les expressions faciales sont influencés par une multitude de facteurs culturels, contextuels, émotionnels ou individuels. Conséquemment, il est impossible de les interpréter de manière fiable sans prendre en compte ces variables.

Les prétentions de la synergologie à pouvoir décrypter les pensées d’une personne à partir de ses gestes sont non seulement infondées, mais aussi dangereuses. Dans le cadre d’un entretien d’embauche ou d’un interrogatoire policier, des décisions importantes peuvent être prises sur la base d’interprétations erronées.

Par exemple, un candidat nerveux lors d’un entretien pourrait être perçu à tort comme malhonnête ou dissimulant des informations, alors que son langage corporel n’est que le reflet de son stress. De même, lors d’un interrogatoire, un suspect innocent pourrait être jugé coupable simplement parce qu’il présente des signes de nervosité, souvent interprétés à tort comme des signes de culpabilité.

Ces interprétations peuvent conduire à des injustices graves. En effet, en s’appuyant sur une pseudo-science comme la synergologie, on risque de tirer des conclusions biaisées qui ne reposent sur aucun fait objectif. L’absence de validation scientifique des techniques de synergologie signifie que les résultats qu’elle propose ne sont que spéculations. Pourtant, certains professionnels continuent de lui accorder une crédibilité injustifiée.

La Programmation Neuro-Linguistique (PNL)

Tout comme la synergologie, la Programmation Neuro-Linguistique (PNL) est une pseudo-science qui prétend améliorer la communication humaine et la compréhension des autres en se basant sur des principes discutables.

Créée dans les années 1970 par Richard Bandler et John Grinder, la PNL repose sur l’idée que les mots, les gestes et les pensées peuvent être reprogrammés pour influencer les comportements, les émotions et même les résultats dans la vie.

La PNL, bien que séduisante dans sa promesse de transformation personnelle, n’est pas fondée sur des preuves scientifiques. En réalité, ses concepts clés, tels que l’idée de « reprogrammer » les circuits neurologiques à travers des exercices spécifiques ou des modélisations comportementales, manquent de validation empirique. Malgré cela, la PNL est utilisée dans le coaching personnel, les formations en entreprise, et même dans certains contextes thérapeutiques. On l’évoque souvent dans les milieux conspirationnistes.

L’un des dangers majeurs de la PNL réside dans son potentiel à dériver vers des comportements sectaires. La PNL promet souvent des changements radicaux, rapides et universels dans la vie des gens, ce qui peut attirer des personnes vulnérables en quête de solutions faciles à leurs problèmes.

Certains coachs en PNL adoptent une attitude de « gourou », promettant des miracles et manipulant psychologiquement leurs clients. Ces dérives peuvent créer une forme de dépendance, où les participants investissent des sommes d’argent considérables et se retrouvent prisonniers d’un système de croyances qui les éloigne de la réalité.

Au lieu de les mener au succès, les « formations » données par ces imposteurs les conduit souvent vers la ruine émotionnelle et financière puisqu’on leur fait croire qu’en investissant des sommes d’argent auprès de « coachs de vie » ils obtiendront de bons résultats. Certains sont tellement convaincus, qu’ils ne réalisent pas le tort qui leur est fait et dépensent jusqu’au dernier sou même s’ils n’obtiennent pas de résultats concrets.

Après une séance, ils se sentent bien, ragaillardis et libérés mais une fois l’ivresse de l’illusion passée, aucun progrès réel n’est réalisé. Alors ils retournent vers leur « gourou » et dépensent encore de l’argent. C’est de cette façon que les « coachs en PNL » créent une dépendance chez leurs clients (ou leurs victimes).

C’est le principe de la pensée magique qui s’applique.

Méfiez-vous des pseudo-sciences !

Qu’il s’agisse de synergologie ou de PNL, il est crucial de comprendre que ces pratiques ne reposent pas sur des bases scientifiques solides. Elles exploitent souvent des concepts psychologiques complexes en les simplifiant à outrance, ce qui les rend attrayantes mais profondément trompeuses. Dans des contextes sensibles comme les entretiens d’embauche, les interrogatoires de police ou les thérapies personnelles, il est impératif de s’appuyer sur des méthodes validées et objectives plutôt que sur des intuitions pseudo-scientifiques.

En fin de compte, la communication humaine est bien trop complexe pour être réduite à une série de gestes ou de mots. La psychologie, en tant qu’authentique discipline scientifique, continue de progresser dans la compréhension de ces phénomènes, mais elle doit se prémunir contre les dérives pseudo-scientifiques qui, en promettant des solutions simples, ne font que semer la confusion et l’exploitation.

La synergologie et la PNL sont des approches séduisantes mais trompeuses. Si une personne tente de vous vendre l’une ou l’autre de ces formations, ce n’est pas votre bien qu’elle veut, c’est votre argent et rien d’autre.