Appelez vos mamans et sortez votre beurre à l’ail: c’est la saison du homard qui commence! De fin avril à fin juin, les pêcheurs de homards sillonneront les berges pour récolter les plus délicieux homards au monde. Quoi? Pas très objective, moi? Non, non, je vous promets que je pèse mes mots.
La vie marine du homard
Avant de parler de pêche, de cuisson et du meilleur accompagnement pour épater vos convives, pourquoi ne pas apprendre à mieux connaître ce crustacé? Après tout, le secret du meilleur homard commence là, dans son environnement naturel.
Pourvus de 10 pattes (8 plus les pinces), le homard a une carapace dure qu’on appelle un exosquelette. Contrairement à nous, qui avons nos «parties molles» autour de nos «parties dures» — je sais, c’est drôlement dit, mais voulez-vous, l’humain est mou! — , le homard a toutes ses parties molles à l’intérieur de son «squelette». Quand il grandit, il doit agrandir cette enveloppe dure en muant: il fabrique un nouvel exosquelette sous celui qu’il possède, puis fend l’ancien sur le dos et s’en extirpe par un seul trou. La nouvelle carapace durcit et remplace l’ancienne, devenue trop petite. Un peu comme s’il changeait de vêtements! Regardez cette vidéo absolument magnifique de l’Aquarium du Québec:
Dommage que ça ne sorte pas aussi bien une fois dans l’assiette!!
Le homard met entre quatre et cinq ans à devenir adulte, ce qui rend les élevages peu productifs. Attendre la maturité est très long, et en grandissant, les homards ont une tendance au cannibalisme, limitant le nombre d’individus possibles dans un même point d’eau. Pas génial pour un élevage commercial! On compte toutefois plusieurs petits élevages qui ont participé à relâcher des individus en nature. C’est un animal qui se reproduit très bien; durant les quelque 50 premières années de vie d’une femelle, elle produira environ 100 000 oeufs! Il faut dire que plusieurs animaux se nourrissent de jeunes homards, et c’est une chance, peu importe à quel point c’est bon, on serait envahis rapidement si nous étions les seuls à s’en délecter!
Plus la femelle est grosse, plus elle a d’œufs dans sa ponte, et comme ils grandissent toute leur vie et ne meurent pas de vieillesse…! Certains scientifiques estiment que les homards vivent une cinquantaine d’années, mais le plus gros homard jamais recensé faisait 20 kg et plus d’un mètre de long! Il avait définitivement dépassé la cinquantaine.
D’autres scientifiques parlent d’une centaine d’années, mais au fond, on ne sait pas vraiment jusqu’à quel âge ils peuvent vivre. Comme ils muent, on peut difficilement les marquer pour faire une étude sur le long terme sans leur nuire. Cependant, on sait que la présence de très vieux, et donc très gros, homards est un signe de la santé de l’environnement. Puisqu’ils sont des prédateurs, ils ne peuvent vivre dans les régions polluées où il y a peu de vie. Dans le jargon, on appelle ces animaux des «bio indicateurs».
Homard bleu vs homard vert vs homard rouge
Il existe deux espèces (trois, selon certains) de homards. Le homard américain, aussi appelé homard canadien, ainsi que le homard bleu, ou homard européen, qui, pour les plus «fancy», se divise en homards français et écossais. Bien qu’il soit effectivement bleu, il devient rouge à la cuisson tout comme notre homard américain.
Quelle est la différence une fois dans l’assiette? En toute honnêteté, je n’ai jamais goûté le homard bleu, mais j’ai fait BEAUCOUP de recherches pour vous trouver la réponse.
Voici mon constat: le meilleur homard à déguster est le vôtre.
Quoi?
Ben… si je cherche sur les sites européens, le meilleur homard est le leur, mais si je cherche des sources sur notre continent, le meilleur, c’est le nôtre! Impossible d’avoir un consensus! Certaines pêcheries affirment que un ou l’autre a une chair plus tendre ou plus ferme, plus gouteuse, ou délicate… mais comme c’est tour à tour un ou l’autre, j’aurais envie de dire qu’il n’y a pas VRAIMENT de différence.
Le homard bleu est un peu plus dispendieux, il doit donc être meilleur, non?
Eh bien, comme beaucoup de choses, c’est principalement la rareté qui en augmente la valeur. En Europe, c’est un peu plus de 4 000 tonnes de homards par an qui est pêché, alors qu’on parle de 105 000 tonnes au canada et de 61 000 aux État-Unis.
Franchement, un mouchoir usagé par Madonna vaut sans doute beaucoup plus cher qu’une boîte de mouchoirs neuves, mais ce n’est que pour sa rareté. Ça reste un vulgaire mouchoir avec un peu de morve. C’est un peu pareil avec les homards européens: ils sont plus rares, donc plus chers, mais ça reste «juste» des homards (sans morve, on espère!).
Bref, le meilleur homard, c’est celui qui vous est le plus accessible, mais surtout le plus frais! Voilà pourquoi le meilleur homard au monde est… celui qui vient de plus proche. Pourquoi je dis que le nôtre est mieux depuis le début, alors? Deux raisons qui ne sont pas culinaires: il est moins cher, et beaucoup d’actions de conservation et de maintient des populations en font une ressource abondante et renouvelée. Deux TRÈS bonnes raisons pour l’appeler le meilleur homard au monde, non?
Pêche et vente
Plus de la moitié du homard consommé dans le monde vient de l’Est du Canada. Les côtes de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick, de l’Île-du-Prince-Édouard, et du Québec sont très riches en homard. La saison de pêche s’étend sur un peu plus de 60 jours à la fin du printemps, et c’est tout un travail. Attrapé dans un piège appelé casier, chaque homard passe sous l’oeil vigilent du pêcheur.
Il faut savoir qu’il n’y a pas de quota de pêche sur les homards, mais plutôt sur le nombre de casiers posés pour chaque pêcheur possédant un permis. De plus, les lois sont très strictes quant à la méthode et à la relâche de certains individus. Ainsi, les femelles portant des oeufs, les grosses femelles, et tous les jeunes spécimens sont immédiatement relâchés.
Plusieurs mesures assurent le renouvellement de la ressource qu’est le homard canadien et, depuis 20 ans, on voit une augmentation des populations sauvages, ce qui est un très bon signe pour l’exploitation durable de cette ressource. Après tout, le homard est considéré comme le crustacé le plus fin et le plus délectable au monde! Quelle bonne idée de prendre soin de cette richesse, non?
Le homard mort n’est plus propre à la consommation. Il s’en dégage alors des bactéries et des enzymes et… sans rentrer dans les détails, qui veut se risquer à manger des fruits de mer pas frais? Bref, après la pêche et le transport, il y a la vente. Quand vous achetez un homard, préférez celui qui est dans un aquarium et qui est bien vivant. Quand vous le prenez, il doit replier la queue sur son ventre: c’est un moyen de défense qui atteste de sa vivacité.
La cuisine… ou l’abatoire!
Eh oui, on ne fait pas d’omelette sans casser les oeufs: il faut TUER un animal pour le manger. Et là viennent tous les scrupules, les arguments, les «pauv’ti!». Voici donc une liste d’arguments pour vous aider à devenir un bon meurtrier de homards:
- Désensibilisez-vous! Le bacon que vous avez mangé ce matin était un cochon. La mouche que vous avez écrasée dans la salle de bain était le proche cousin du homard. Et vous l’avez tuée pour rien! Au moins, le homard vous remplira la panse! Alors voilà: oui, vous tuez un animal, mais vous jouez le rôle du prédateur dans un environnement qui serait envahi de homards sans vous. Au fond, vous sauvez les écosystèmes marins des potentiels envahisseurs. Ça va mieux, maintenant?
- Les études ne sont pas à 100% claires à savoir si le homard souffre ou non, et s’il meurt rapidement ou non. Hey, les amis… les crustacés sont les cousins des araignées et des insectes… Je sais qu’il est plus gros et tout, mais ça reste comme mettre de l’insecticide dans votre jardin. Dans tous les cas, si un animal marin décide de manger le homard, il ne cherchera pas à lui épargner des souffrances… et il faut bien mourir un jour! Alors mourir démembré par un animal, ou ébouillanté par un humain…
Les lois à certains endroits défendant de cuire les homards vivants pour leur épargner de souffrir sont, à mon sens, risibles. Même s’il ressent la douleur, son cerveau n’est pas aussi développé que nous et sa conscience de la douleur est certainement très différente. Ce qui se passe dans les élevages de mammifères est bien plus consternant que ce que vous ferez à votre homard, alors allez-y sans culpabilité et tuez-moi ce homard! - Le homard ne crie pas. Il s’agit seulement de l’air contenu dans sa coquille qui s’échappe. Comme une casserole d’eau qu’on fait bouillir avec son couvercle: la vapeur s’échappe par les petits trous et produit un sifflement.
- Par contre, il se défend en repliant la queue: pensez à la plonger la tête la première pour éviter de vous faire éclabousser d’eau bouillante.
- Si vous n’êtes absolument pas convaincus de vouloir tuer votre homard dans la casserole, vous pouvez toujours utiliser le plan B et le couper en deux dans le sens de la longueur, en commençant par la tête. La mort est instantanée, c’est comme une décapitation. Vous pouvez ensuite le faire cuire au four ou au BBQ.
- Si vous refusez catégoriquement de tuer dans votre cuisine, il reste les options précuites, le resto, et l’abstinence!
Le homard sur la table
Nous voilà finalement arrivés à la fête des Mères, la table croulant sous les homards et le beurre à l’ail! Mais attention: deux choses à prendre en compte. Premièrement, ne faites pas revoler des bouts de carapace dans la face de votre belle-mère. L’ouverture de crustacés est un art et le faire sans se blesser, ou se couvrir de honte, ne se fait pas à son premier spécimen! Soyez prudents.
Deuxièmement, si vous êtes amateurs de tomallis (foies de homards), sachez qu’ils sont bourrés de polluants. Étant des prédateurs, les homards accumulent tout au long de leur vie les polluants que leurs proies, ainsi que les proies de leurs proies, ont ingérées. Ces polluants de toutes sortes s’accumulent ensuite dans le foie et peuvent être toxiques pour l’homme. Évidemment, un foie de homard n’est pas très gros, mais Santé Canada recommande tout de même de ne pas dépasser deux tomallis par jour pour éviter les intoxications.
Troisièmement, assurez-vous de bien respecter votre homard dans la cuisson et les accompagnements. Voici quelques trucs, astuces et idées de recettes pour continuer votre apprentissage sur ce délicieux mets de saison:
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Bon appétit!
Appelez vos mamans et sortez votre beurre à l'ail: c'est la saison du homard qui commence :)Partager cette trouvaille!Partager!Envoyer par courrielEnvoyer!