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Les origines françaises de la langue anglaise

Quand l’anglais parle français… Découvrez pourquoi ! 📜

La langue anglaise, aujourd’hui mondialement parlée, est composée d’environ 30% de mots d’origine française. Cette influence s’explique principalement par des raisons historiques, en particulier l’invasion normande de l’Angleterre en 1066 et le règne de la monarchie et de l’élite francophones qui s’ensuivit.

Les origines de l’anglais

Pendant plusieurs siècles, la cour royale, la noblesse, l’église, et même le système juridique utilisaient le français, faisant ainsi de cette langue une partie intégrante du développement de l’anglais moderne.

L’invasion normande et le règne francophone

Guillaume le Conquérant et Harold II

La première étape majeure dans l’influence du français sur l’anglais est la conquête normande de l’Angleterre. En 1066, Guillaume le Conquérant, duc de Normandie, envahit l’Angleterre, renversant Harold II à la bataille de Hastings et s’emparant du trône. Les Normands, d’origine scandinave, avaient déjà adopté le français comme langue, ce qui signifiait que la couronne anglaise et son aristocratie allaient désormais parler une variante du français, connue sous le nom de « français normand ».

Pendant près de trois siècles après cette invasion, l’élite anglaise utilisait le français comme langue principale. La cour, l’administration et l’église se déroulaient en français, tandis que la majorité de la population continuait à parler l’anglais anglo-saxon (ou vieil anglais), une langue germanique. Ce bilinguisme entraînait une infusion constante de mots français dans l’anglais.

La prière du « Notre Père » en vieil anglais

Le français devint également la langue des lois et du gouvernement. Par exemple, la « Magna Carta », un document fondamental de l’histoire britannique, fut rédigée en latin mais influencée par le vocabulaire juridique en français.

Les influences de la monarchie et de l’église

Le Palais des Papes à Avignon en France fut jadis le centre du monde catholique. Les papes y ont résidé de l’an 1309 à 1418

La monarchie anglaise fut profondément influencée par la culture et la langue françaises. Les rois et reines d’Angleterre épousaient souvent des membres de la noblesse française, renforçant l’usage du français à la cour. Ce fut également le cas de l’Église catholique, qui exerçait un pouvoir considérable à l’époque. Le clergé anglais, souvent éduqué en France ou par des prêtres francophones, adoptait le français pour les textes religieux et les sermons.

Ainsi, les termes liés à la monarchie, à la loi, à la culture, et à la religion sont souvent issus du français. Par exemple, des mots comme « crown » (couronne), « parliament » (parlement), « court » (cour), et « judge » (juge) proviennent directement du français.

L’évolution de l’anglais et l’influence durable du français

L’impact de cette période de domination du français est considérable sur la langue anglaise moderne. De nombreux mots qui nous semblent aujourd’hui purement anglais sont en fait d’origine française. Ces mots couvrent une large gamme de domaines, qu’il s’agisse de la gastronomie, de la politique, de la justice ou de l’art. Des centaines de mots et expressions anglaises encore d’usage dans ces domaines sont d’origine française :

Le vocabulaire juridique :

Le domaine de la loi est particulièrement influencé par le français. Des mots comme « justice », « jury », « plaintiff » (plaignant), et « verdict » sont directement issus du français. Cette influence perdure jusqu’à aujourd’hui dans le jargon judiciaire.

Les titres et la politique : 

Des termes comme « government » (gouvernement), « nation », « council » (conseil), « minister » (ministre), « parliament » (parlement) et « sovereign » (souverain) viennent également du français. Ces mots sont essentiels dans la structure politique britannique, américaine et d’autres nations anglophones.

La gastronomie :

La nourriture est un autre domaine dans lequel l’influence française est notable. Des mots comme « beef » (bœuf), « pork » (porc), « mutton » (mouton), et « veal » (veau) sont tous d’origine française.

Cela s’explique par le fait que les nobles, qui mangeaient de la viande, parlaient français, tandis que les paysans, qui élevaient les animaux, parlaient anglais. C’est ainsi que les animaux eux-mêmes (cow, pig, sheep) ont conservé leurs noms en vieil anglais, tandis que la viande cuisinée prenait un nom français.

Arts et culture : 

Les mots « theatre » (théâtre), « ballet », « genre », « portrait », et « vogue » proviennent tous du français, démontrant l’influence de la France sur les arts et la culture.

Le système des tiers et la structure sociale

La devise de la monarchie anglaise « Dieu et mon droit » et celle de la chevalerie anglaise est « Honi soit qui mal y pense » figurent encore sur les armes britanniques.

Un autre aspect important de cette histoire est la hiérarchie sociale qui se développe en Angleterre après l’invasion normande. Le système des tiers (ou des trois ordres) devient un concept important, avec la noblesse, le clergé, et les roturiers. Ce système reflète l’influence des structures sociales françaises. Les mots « nobility » (noblesse), « clergy » (clergé), et « peasant » (paysan) sont tous issus du français et illustrent cette division sociale. L’élite française tenait les rênes du pouvoir politique, religieux et social en Angleterre, ce qui influença la culture anglaise dans son ensemble.

La chute du français et la montée de l’anglais

Au fil des siècles, l’utilisation du français par l’élite diminue progressivement. La guerre de Cent Ans (1337-1453), entre l’Angleterre et la France, intensifie les tensions entre les deux pays, et l’anglais commence à reprendre sa place comme langue principale de l’administration et de la cour royale.

En 1362, l’anglais devient officiellement la langue des tribunaux anglais, avec l’adoption du « Statute of Pleading », qui est rédigé en français et en anglais. Les procès qui se déroulaient en français désavantageait la population qui parlait majoritairement l’anglais. Les registres et débats du Parlement continuent d’être rédigés en français jusqu’en 1386.

À la fin du XIVe siècle, de plus en plus d’auteurs se mettent à utiliser l’anglais qui devient une langue littéraire raffinée. Citons notamment l’écrivain Geoffrey Chaucer l’auteur des Contes de Canterbury que l’on considère comme l’un des pères de l’anglais. La Bible est finalement traduite intégralement du latin à l’anglais ce qui consacre l’anglais comme langue reconnue, même si elle est encore vernaculaire (locale) à l’époque.

Encore au XVe siècle l’anglais est de plus en plus utilisé dans l’administration anglaise, mais le latin reste d’usage pour de nombreux documents politique et diplomatique tandis que le français demeure la langue juridique en Angleterre même si les procès se déroulent maintenant en anglais. Le français n’est définitivement remplacé par l’anglais comme langue d’usage de l’administration qu’en 1731.

Goeffrey Chaucer

La langue anglaise continue de prendre sa place au fil des générations même si certains auteurs célèbres comme l’auteur de Gulliver, Jonathan Swift, se plaint de la pauvreté du vocabulaire anglais comme langue d’écriture.

William Shakespeare

William Shakespeare parvient tout de même à consacrer l’anglais, devenu plus moderne, avec son imposante œuvre littéraire.

L’évolution de l’anglais au fil des siècles :

Cependant, même avec ces changements, l’influence du français ne disparaît pas. La majorité des mots français intégrés dans l’anglais au cours des siècles précédents sont restés dans le vocabulaire anglais, et beaucoup continuent à être utilisés dans le langage quotidien.

Exemples de convergence grammaticale :

Les noms de terminaison «…tion » ont le même sens qu’en français : portionsection. Même le mot translation, qui signifie habituellement « traduction », a le sens de « translation » dans le domaine technique.

Les noms de terminaison «…ty » ont souvent leur équivalent français en «…té » : diversity (diversité).

Les noms de terminaison «…ism » ont souvent leur équivalent français en «…isme » : communism  (communisme).

Les noms de terminaison «…ology » ont souvent leur équivalent français en «…ologie » : biology (biologie).

Les adjectifs en « …able » ou « …ible » ont aussi un sens proche du français quand ils sont formés sur des racines d’origine française ou latine : capable (capable), impossible (impossible).

Les adjectifs en « …ous » sont souvent transposables en « …eux » : delicious (délicieux), fabulous (fabuleux), precious (précieux).

Les verbes en « …ate » correspondent généralement à des verbes français du premier groupe (« …er ») : tolerate (tolérer), create (créer), enumerate (énumérer).

Les verbes en « …ize » (ou « …ise », laquelle orthographe est plus courante en anglais britannique) correspondent à des verbes français en « …iser » : privatize (privatiser), realize (réaliser), colonize (coloniser).

Autres mots anglais empruntés du français :

Apostrophe, attaché, apéritif, avant-garde, baguette, bureau, brunette, cabaret, chic, cliché, chauffeur, débris, élite, façade, machine, maisonnette, risqué, ridicule, silhouette, souvenir, sabotage, technique, réservoir, répertoire, restaurant, omelette, vinaigrette…

On estime qu’environ 80 000 mots anglais sont d’origine française… Bref, nous sommes tous un peu bilingue… Même si certains ont besoin de beaucoup d’entraînement pour la prononciation !

Source : la magnifique image du drapeau franco-britannique est une conception de Baptiste et vous pouvez le retrouver ici sur DeviantArt.



Et si l’anglais était bien plus influencé par le français qu’on ne le croit ? Un voyage surprenant dans l’histoire des langues.
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François Paquette

Animateur de radio, podcaster et blogueur.

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