Accueil » Culture » Héros et mythe québécois » Pierre Le Moyne d’Iberville, le corsaire québécois

Pierre Le Moyne d’Iberville, le corsaire québécois

Pierre Le Moyne d'Iberville: Ce que vous ne savez pas sur le corsaire Québécois

Dans cette chronique, nous nous intéressons à un Canadien français qui a excellé à la fois dans le domaine de la navigation, ainsi que dans l’art de la guerre. Dans le contexte d’une époque où la force brute était une question de survivance, ce héros oublié a réalisé des exploits dignes d’un grand film d’Hollywood.

Pierre Le Moyne d’Iberville a vécu entre 1661 et 1706

Fils d’un riche commerçant de fourrure basé à Ville-Marie (Montréal), Pierre Le Moyne d’Iberville voit le jour le 16 juillet 1661. D’abord destiné à la prêtrise, il commence sa carrière de marin à l’âge de 12 ans à bord de la Janette, le navire de son oncle. Au cours des années suivantes, il pratique le commerce de la fourrure à bord de différents bâtiments. Il acquiert ainsi de l’expérience et gravit les échelons, passant de simple mousse (ou moussaillon) à quartier-maître, avant de revenir au bercail. Sa vocation religieuse est abandonnée au profit de sa nouvelle passion.

Pierre Le Moyne d’Iberville a seulement 25 ans lorsque le chevalier Pierre de Troyes lui confie le commandement de trois postes de traite de fourrure de la Nouvelle-France, situés sur les rives de la baie d’Hudson. Iberville, qui parvient à la rivière Nelson, vainc et s’empare de deux navires anglais chargés de vivres, de fourrures et autres marchandises. Glorieux, il ramène son butin en Nouvelle-France.

Au cours de l’hiver suivant, il séjourne en France et réussit à convaincre Versailles de renforcer les positions françaises au nord de la Nouvelle-France pour soutenir la Compagnie de la Baie d’Hudson, aux prises avec les attaques incessantes des Anglais et des Iroquois. Le roi lui confie le commandement de l’un de ses meilleurs navires : Le Soleil d’Afrique. Une fois de retour en Nouvelle-France, Pierre Le Moyne d’Iberville demande la permission d’attaquer et de prendre possession du fort York, qui garde la porte d’entrée de la rivière Nelson et du territoire qui est devenu le Manitoba actuel.

Avec un équipage d’une vingtaine d’hommes seulement, il arraisonne deux navires anglais et capture plus de 80 hommes.

Le vaisseau d’Iberville affrontant des navires anglais

Le pavillon français flotte temporairement au-dessus des forts de la baie James dont il se rend maître. Malgré ces victoires, la Nouvelle-France demeure menacée par la présence des Anglais, de plus en plus nombreux. D’ailleurs, plusieurs attaques d’origine anglaise surviennent, dont l’une à Lachine, sur l’île de Montréal, qui se solde avec le massacre de ses habitants. Le gouverneur de la Nouvelle-France, Frontenac, organise alors une riposte, au cours de laquelle les Français, dont Iberville, exercent une cruelle vengeance, en incendiant une communauté de la région de New York et massacre, à leur tour, la population locale.

Des exploits en série

Après quelques années de calme relatif, les Anglais reprennent le contrôle des postes de la baie d’Hudson. Iberville y retourne pour conquérir le fort Nelson. Victorieux, Iberville accepte une nouvelle mission : patrouiller l’Atlantique. Il se rend ainsi jusqu’au Maine, où il s’empare héroïquement du Fort William Henry. Il met ensuite le cap sur Terre-Neuve, qui se trouve alors sous le contrôle des Anglais, avec pour objectif d’assujettir le territoire à coups d’expéditions, toutes aussi meurtrières les unes que les autres. Il commence par assiéger et prendre possession du fort St-Jean avec une armée de moins de 200 hommes. Il incendie la colonie et détruit l’essentiel de l’industrie de la pêche, une précieuse ressource sur les côtes terre-neuviennes.

Pierre Le Moyne d’Iberville attaquant un fort anglais

Iberville n’a guère le temps de profiter de sa victoire, puisqu’encore une fois, les forts de la Baie d’Hudson – point névralgique du commerce très lucratif de la fourrure – tombent aux mains de l’armée anglaise, qui a su profiter de l’absence du Canadien-Français.

Pierre Le Moyne d’Iberville reçoit alors l’ordre de se rendre sur place pour régler leur compte aux Anglais. Aux commandes de son nouveau navire, le Pélican, le valeureux soldat navigue vers son objectif, suivi de trois autres bateaux français. Ayant pris de l’avance sur le reste de la flotte, il s’engouffre le premier dans l’embouchure de la rivière Hayes, où il est attendu de pied ferme par trois vaisseaux anglais lourdement armés : le Hampshire, le Dering et le Hudson’ Bay. Un autre capitaine eut été dans un pétrin mortel, mais Pierre Le Moyne d’Iberville n’est pas un homme ordinaire. Contre toute attente, il coule un premier navire anglais, s’empare du deuxième et met le troisième en déroute. Quand le reste de l’escadre française arrive en renfort, la bataille est finie depuis longtemps. Son exploit incroyable eut peu d’impact à long terme, puisque le traité de Ryswick, signé une semaine plus tard entre la France et l’Angleterre pour mettre fin aux hostilités, concède la Baie d’Hudson aux Anglais, laissant la Baie James aux Français.

La Louisiane d’Iberville

La Nouvelle-France à l’époque de Pierre Le Moyne d’Iberville incluant la Louisiane

Une fois la paix instaurée dans la baie d’Hudson, les services de notre héros ne sont plus requis dans ses eaux glaciales. Pierre Le Moyne d’Iberville regarde vers le sud. Il veut étendre le territoire de la Nouvelle-France sur l’ensemble de l’Amérique du Nord. Son premier objectif est d’établir une colonie à l’embouchure du Mississippi. Il plaide : « Si la France ne se saisit pas de cette partie de l’Amérique qui est la plus belle […] la colonie anglaise qui devient très considérable s’augmentera de manière que, dans moins de cent années, elle sera assez forte pour se saisir de toute l’Amérique et en chasser toutes les autres nations ». L’histoire lui donna éventuellement raison, mais pas avant qu’il eût porté ses desseins à terme.

Le 2 mars 1699, il réussit là où Robert Cavelier de La Salle avait précédemment échoué, en découvrant un passage reliant la mer à l’embouchure du Mississippi. Le navigateur canadien multiplie les expéditions et explore les côtes du Golfe du Mexique. Durant cette période, il construit des forts pour assurer et défendre la présence française sur la nouvelle colonie fondée et dirige brièvement en tant que commandant général de la Louisiane. Il retourne finalement en France, laissant sur place une garnison de 81 hommes sous le commandement de son frère Jean-Baptiste Le Moyne de Bienville, qui allait fonder La Nouvelle-Orléans en 1718.

Les frères Le Moyne

De retour en France, Pierre Le Moyne d’Iberville fut sacré chevalier de Saint-Louis, devenant ainsi le premier Canadien de naissance à recevoir ce titre.

Le corsaire

Pierre Le Moyne d’Iberville termine sa carrière en semant la terreur dans les Antilles en tant que corsaire, au cours de la guerre de Succession d’Espagne. Il conquiert l’île de Nevis, neutralise l’opposition qui s’y trouve et la pille sans vergogne. Il se rend ensuite à La Havane, dit-on, pour y vendre une cargaison de fer. Ce sera le dernier voyage de cet homme de guerre canadien-français, dont les exploits résonnent encore de nos jours. Il s’éteint d’une maladie mystérieuse – possiblement la fièvre jaune – à bord de son navire, le Juste, le 9 juillet 1706. Sa dépouille est inhumée en l’Église de San Cristobal, à La Havane, sous le nom de « El General Dom Pedro Berbila ».

Pierre Le Moyne d’Iberville a marqué l’histoire de la conquête de l’Amérique en tant qu’explorateur, navigateur, commerçant, militaire et corsaire. Il est certainement l’un des plus grands héros canadiens-français de l’histoire de notre pays.



Oubliez Jack Sparrow, le meilleur « pirate » est un Canadien-Français bien réel ! Découvrez le récit de ses exploits ici !
Partager cette trouvaille!Partager!Envoyer par courrielEnvoyer!
Moyenne de 5 sur 50 votes

Photo de profil de François Paquette

François Paquette

Animateur de radio, podcaster et blogueur.

5 réflexions au sujet de “Pierre Le Moyne d’Iberville, le corsaire québécois”

  1. Très intéressant. Bien que je connaissais P. Le Moine d’intervalle, j’ignorais qu’il avait remporté autant de victoires contre les Anglais. De plus, il avait une vision expansionniste de la Nouvelle-France.

    Répondre

On veut votre avis sur ce contenu québécois