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Invasion américaine : la bataille de Québec

L'échec de l'invasion américaine à Québec

Vers la fin de l’année 1775, alors que la Révolution américaine bat son plein, les treize colonies insurgées contre la couronne britannique nourrissent une ambition audacieuse : entraîner le Canada dans leur mouvement indépendantiste, en en faisant la 14e colonie américaine. Les chefs révolutionnaires croient alors que les Canadiens, majoritairement francophones et récemment conquis par les Britanniques en 1763, accueilleront les troupes américaines en libérateurs. Mais cette estimation s’avère catastrophiquement erronée.

Pour bien comprendre la guerre d’indépendance américaine :
https://quebecblogue.com/la-guerre-dindependance-americaine-en-7-evenements-marquants/

C’est dans ce contexte que s’inscrit la bataille de Québec, l’un des épisodes les plus dramatiques et humiliants pour l’armée continentale.

Une double expédition difficile

Le Congrès continental est l’assemblée législative des treize colonies à l’origine des États-Unis.

L’initiative de l’invasion du Canada revient en grande partie au Congrès continental, qui autorise une campagne militaire en direction du nord. Deux colonnes sont formées.

Les murs de Montréal se sont ouvert pour les Américains

La première, sous le commandement du général Richard Montgomery, part de Fort Ticonderoga, dans l’actuel État de New York. Elle prend Montréal qui capitule sans même résister en novembre 1775, ce qui galvanise l’effort révolutionnaire.

La seconde colonne, plus ambitieuse et dirigée par un jeune officier audacieux nommé Benedict Arnold, emprunte une route périlleuse à travers le Maine, longeant les rivières Kennebec et Chaudière jusqu’à la ville de Québec.

Cette marche de plus de 600 kilomètres dans un territoire inhospitalier s’effectue sous des conditions extrêmes : températures glaciales, tempêtes de neige, famine, maladies. Près de la moitié des hommes d’Arnold périssent ou désertent avant même d’arriver.

Québec : une citadelle imprenable

En décembre 1775, les deux colonnes se rejoignent enfin devant la ville fortifiée de Québec, capitale de la province. Elle est alors commandée par le gouverneur britannique Guy Carleton, un homme expérimenté qui connaît bien le terrain et les Canadiens. Malgré la perte de Montréal, il s’est réfugié dans Québec et y a renforcé les défenses avec efficacité.

Les fortifications massives de Québec, héritées du régime français et entretenues par les Britanniques, en font une véritable citadelle. La ville est entourée de murs, de bastions, de redoutes et bénéficie d’un terrain escarpé qui favorise la défense. Carleton mobilise environ 1 800 hommes : soldats britanniques, miliciens canadiens, volontaires loyalistes et marins. Contrairement aux espérances américaines, peu de Canadiens rejoignent la cause révolutionnaire, encore méfiants à l’égard de leurs anciens conquérants américains.

Pour connaître l’histoire des fortifications de Québec :

L’assaut du 31 décembre 1775

Alors que le siège traîne dans un hiver de plus en plus rigoureux, Montgomery et Arnold comprennent qu’ils n’ont ni le temps ni les ressources pour attendre un renfort du printemps. Ils décident donc de lancer un assaut désespéré dans la nuit du 31 décembre, croyant que la tempête de neige en cours surprendra la garnison.

Bataille dans la tempête du 31 décembre 1775

Le plan consiste à attaquer la ville en deux colonnes. Montgomery doit avancer par le sud-ouest, tandis qu’Arnold attaque par le nord-est, espérant se rejoindre dans la basse-ville pour prendre les défenses de revers.

Le plan de bataille des Américains

Mais dès le début de l’opération, les erreurs s’accumulent.

Montgomery tombe dans une embuscade près du cap Diamant. Lui et plusieurs de ses officiers sont tués sur le coup par une salve de canon. Sa colonne, désorientée et sans chef, bat rapidement en retraite.

De son côté, Arnold réussit à pénétrer dans la basse-ville mais est rapidement blessé à la jambe. Le commandement revient au capitaine Daniel Morgan, qui mène un combat acharné dans les rues étroites. Mais les troupes américaines sont bientôt encerclées par les forces loyalistes, appuyées par des tirs de mitraille depuis les remparts. Coincés, sans renforts, les survivants sont forcés de se rendre.

La déroute américaine

La bataille de Québec est un désastre complet pour les Américains. En tout, plus de 400 soldats sont faits prisonniers, y compris de nombreux officiers. Ceux-ci sont traités conformément aux règles de la guerre, et plusieurs sont emprisonnés à Halifax, d’autres à Londres.

Le blocus de Québec

Benedict Arnold, bien que blessé, reprend brièvement le commandement et tente de maintenir un blocus autour de Québec pendant l’hiver, espérant des renforts au printemps. Mais la situation devient intenable. En mai 1776, l’arrivée de navires britanniques avec des troupes fraîches pousse Arnold à ordonner une retraite précipitée vers Montréal, puis vers le sud. L’armée continentale quitte le Canada en piteux état, décimée par le froid, les maladies et le manque de soutien local.

Benedict Arnold fuyant Québec

Cette tentative d’invasion est non seulement un échec militaire, mais aussi un tournant stratégique. Elle scelle le sort du Canada, qui ne rejoindra jamais le projet révolutionnaire américain.

Une leçon d’histoire… et une résonance inquiétante en 2025

La bataille de Québec démontre qu’un territoire ne se conquiert pas uniquement par les armes, mais aussi par la volonté des populations locales. En 1775, les révolutionnaires américains ont échoué à rallier les Canadiens à leur cause, croyant à tort qu’ils les accueilleraient en libérateurs. Leur défaite fut non seulement militaire, mais aussi idéologique : le Canada refusait déjà d’être une simple extension des États-Unis.

Plus de deux siècles plus tard, cette page d’histoire prend un relief troublant face aux ambitions expansionnistes exprimées par le président Donald Trump en 2025. Dans un contexte de tension internationale, de protectionnisme agressif et de guerre tarifaire, Trump va jusqu’à menacer publiquement d’annexer le Canada pour en faire le 51e État américain, évoquant ses ressources naturelles et sa proximité stratégique. Ces propos, bien que qualifiés de provocateurs par plusieurs analystes, sèment une inquiétude profonde quant à la stabilité économique et politique du Canada et rappellent les tentatives du passé.

Mais l’histoire de la bataille de Québec nous enseigne une chose essentielle : le Canada a su, déjà en 1775, défendre son autonomie contre les ambitions américaines. Aujourd’hui encore, cette résilience reste un rempart contre toute tentative d’ingérence ou d’annexion.



Avant de parler du 51e état, les Américains voulaient faire de nous leur 14e colonie. Québec a dit NON !
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François Paquette

Animateur de radio, podcaster et blogueur.

2 réflexions au sujet de “Invasion américaine : la bataille de Québec”

  1. La réalité fut plus nuancée que ce qui est présenté ici. À cette époque, les Québécois répugnaient généralement à servir de chair à canon pour les Britanniques et ils furent nombreux à être sympathiques à la cause des Treize colonies. À Montréal, le 9 novembre 1775, le général Richard Montgomery, commandant de l’armée continentale, fut accueilli en libérateur à la Pointe-Saint-Charles. Il sera toutefois défait et perdra la vie le 31 décembre suivant, lors du siège de la ville de Québec. La tentative d’invasion échouera bientôt avec l’arrivée d’Europe de renforts pour les Britanniques et Carleton établira sans tarder une commission pour enquêter à la grandeur du Québec sur le comportement des milices afin de réprimer ceux qui auront collaboré avec l’ennemi. «Le jugement des commissaires est plutôt sévère. Toutes les paroisses se sont fait reprocher leur collaboration avec l’ennemi». (Gauthier 2020)

    L’histoire traditionnelle, longtemps influencée par les institutions catholiques qui collaboraient avec les Britanniques, ramène généralement cet épisode en sol québécois du début de la guerre d’indépendance des États-Unis à la seule victoire des Britanniques lors du siège de la ville de Québec, à laquelle on ne manque jamais d’associer et d’appuyer sur une substantielle participation de la milice québécoise. On détourne la vérité. Les historiens savent aujourd’hui qu’il en a été tout autrement de l’implication des milices québécoises. À l’automne 1775 le gouverneur Carleton et les forces britanniques s’étaient littéralement enfuis de Montréal et s’étaient retranchés dans la ville de Québec, siège de l’épiscopat catholique:

    «Il faut garder en mémoire que les Américains contrôlaient alors tout le territoire de la province, et assiégeaient Québec, la seule position encore détenue par les forces gouvernementales. Quelques Canadiens avaient tout de même répondu à l’appel du gouverneur à Québec: on dénombrait en effet trois cents Canadiens parmi les troupes qui défendaient Québec. Au nombre des miliciens canadiens se trouvaient les étudiants plus âgés du séminaire de Québec […] Les Américains comptaient quant à eux quelques deux cents Canadiens au sein de leur armée devant Québec, mais ils avaient bénéficié de la collaboration des habitants dans tous les villages qu’ils avaient traversés et pouvaient compter sur la collaboration, enthousiaste ou non, des habitants des villages des environs de Québec pour les corvées d’approvisionnement durant toute la durée du siège.» (Gauthier 2020)

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