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5 faits surprenants sur le béluga du St-Laurent

Les 5 faits les plus étonnants sur le béluga du St-Laurent !

Baleine blanche et majestueuse, le béluga est bien connu pour sa bouille sympathique, sa couleur immaculée unique chez les grands mammifères marins, et sa capacité à vivre en eau froide. Toutefois, ce ne sont pas des bélugas de l’Arctique dont il est question aujourd’hui, mais bien d’une petite population vivant chez nous, dans l’estuaire et le golfe du St-Laurent.

Un béluga, c’est un béluga, non ?

En théorie: oui. Dans les faits, la population québécoise est isolée des «autres» bélugas depuis bien longtemps et des différences ont fini par se manifester.

Pensez-y: vivez-vous de la même manière que les gens des tropiques ?

Non, il y a des différences au niveau de nos habitudes, de notre alimentation, de notre langue, et aussi de notre histoire.

C’est la même chose pour cet animal. Soyez donc prévenus: l’article du jour concerne la population de bélugas du St-Laurent… et les différences avec ses cousines du nord!

1. Bébé béluga et mammy ménopause

Dans une même population, des petits groupes se forment et sont composés d’individus du même sexe et du même âge. Chacun de ces groupes occupe une portion de territoire. C’est pratique pour les jeunes mamans puisque les autres femelles de leur groupe peuvent aider à s’occuper des jeunes. Ceux-ci sont gris, et devront attendre l’âge de 10 ans environ avant de devenir immaculés.

Quelques chiffres :

  • La gestation est de 14 à 15 mois (!!!)
  • Le veau (le jeune) est allaité pendant 20 à 32 mois.
  • C’est vers l’âge de 3 ans que le jeune est indépendant et que la mère peut se reproduire de nouveau.
  • Le jeune ne pourra se reproduire avant l’âge de 8 à 14 ans pour la femelle, et de 12 à 14 ans pour le mâle.
  • Les femelles n’ont qu’un seul petit à la fois tous les 4 à 5 ans, et se reproduisent jusqu’à l’âge de 40 ans.
  • Leur espérance de vie est entre 70 et 80 années.

Je sais, je sais… les chiffres! Ce n’est pas le plus intéressant, mais on peut tirer plusieurs conclusions de ceux-ci:

Premièrement, c’est une espèce à la reproduction très lente. Une femelle aura dans sa vie un gros maximum de 8 bébés. Ça la rend sensible en cas de catastrophe, car reconstruire une population peut prendre plusieurs décennies, voir des siècles! Comme c’est une espèce très vulnérable à la pollution chimique (les bélugas mangent des animaux filtreurs qui accumulent naturellement les toxines de l’environnement), vulnérable aux collisions avec les bateaux, vulnérable à la pêche… On peut en conclure qu’il faut en prendre soin!

Mère et son petit. Photo: Tony Fox

Une autre déduction que vous avez peut-être faite avec les chiffres ci-haut, c’est que les femelles ont… une ménopause! Les espèces qui cessent de se reproduire avant la fin de leur vie sont très, très rares dans le règne animal. Mais pourquoi? Si elle se reproduit si peu dans sa vie, pourquoi abréger encore plus ses chances de reproduction?

À cela je vous répondrai: ELLES ONT LE DROIT DE VIVRE LEUR VIE !

Mais la vraie réponse est probablement moins libératrice… Les femelles ménopausées sont… des grands-mamans aimantes qui aident les plus jeunes femelles dans leur tâche de mère monoparentale. Ouais, je sais… ça reste des mamans jusqu’au bout au fond!

Parlant de ménopause, j’en ai une bonne pour vous: comment on appelle la femelle du béluga? Le bélufille!

2. Une tête de melon

Non, ce n’est pas une insulte gratuite: la bosse sur leur front se nomme bel et bien le «melon»!

Il sert à faire de l’écholocation, c’est-à-dire que le béluga peut émettre des ultrasons et se diriger avec les échos de ces sons qui reviennent vers… son melon.

Le melon est mou comme du jello! Photo: Premier.gov.ru

Il faut savoir que le son rebondit sur les obstacles comme le ferait un ballon, et les bélugas, comme les chauves-souris, ont la capacité de percevoir ces échos et de les utiliser pour se déplacer, sans se heurter aux obstacles. Utile quand on plonge à 500 mètres de profondeur, ou qu’on circule dans des tunnels de glaces sous-marins dans le Grand Nord. C’est en fait plus pratique qu’une lampe frontale pour se promener dans l’obscurité totale.

Avez-vous vu le film Trouver Doris ? Le segment où Bailey guide Doris à travers un dédale de tuyaux labyrinthique est assez représentatif du pouvoir fascinant de l’écholocation!

3. Un excellent chanteur

Les baleines en général sont assez loquaces. Elles communiquent entre elles en émettant des centaines de sons différents, et ce, sur des fréquences que nous, humains, ne pouvons parfois même pas entendre.

Le béluga ne fait pas exception : il chante plus que la plupart des autres espèces et a même reçu le surnom de «canari des mers».

Sons: https://parcmarin.qc.ca/beluga/

D’ailleurs, les baleines ont des oreilles; sinon à quoi serviraient tous ces chants? Ils n’ont pas d’oreille externe, comme nous, ce qui signifie qu’il ne reste que l’oreille interne.

Qu’est-ce que c’est? C’est simple: tout ce qui dépasse de votre tête est l’oreille externe et sert à capter les sons. Le trou, quant à lui, est l’entrée de l’oreille interne. Comme les sons voyagent mieux dans l’eau, les animaux marins n’ont pas besoin de cette espèce d’entonnoir à sons qu’est l’oreille externe.

Le petit trou à gauche, légèrement plus bas que l’œil est l’oreille du béluga. Photo: https://www.belugawhalealliance.org/

4. Cousin de la licorne des mers

Saviez-vous ça ? Le canari est le cousin de la licorne… enfin… dans le monde marin!

Ces deux baleines (je parle évidemment du béluga et du narval) sont les deux seules représentantes de la famille des monodontidae. Depuis 2016, un narval (manifestement perdu) vit d’ailleurs avec nos bélugas du St-Laurent! Il y est encore en 2023 et semble se porter très bien.

Naval mâle. Photo: пресс-служба ПАО « Газпром нефть »

Les points communs entre ces deux espèces sont le cou mobile (car les vertèbres cervicales ne sont pas soudées comme chez les autres baleines), mais surtout: l’absence de nageoire sur le dos. Il y a deux hypothèses entourant la bosse qui remplace la nageoire dorsale:

  1. Soit elle sert à briser la glace pour rejoindre la surface et respirer.
  2. Soit elle a disparu en réponse à la température polaire dans l’habitat de ces baleines nordiques.

Hypothèse 1: Les baleines et dauphins sont des mammifères, pas des poissons. En conséquence, elles doivent respirer de l’air avec leurs poumons, comme nous. Leur nez a migré vers le dessus de la tête pour former l’évent qui sert à respirer (et non à projeter de l’eau comme le laissent croire les dessins animés!!).

Évent de béluga. Photo: Stan Shebs

Hypothèse 2: En tant que mammifères, les bélugas ont également le sang chaud. Cela signifie qu’elles doivent garder leur corps à une température relativement stable de… 37°C! Eh oui, comme nous!

Vous imaginez vous baigner en Arctique sans protection? Brrr!

Heureusement pour elles, les baleines peuvent compter sur une bonne couche de graisse pour se garder au chaud. Chez le béluga, elle atteint près de 10 centimètres d’épaisseur par endroit!

Et maintenant, pensez à vous cet hiver. Quel est l’endroit de votre corps qui a eu le plus froid? Vos doigts? Vos oreilles? Vos orteils? Dans tous les cas, c’est une de vos extrémités. C’est très normal: lors qu’il fait froid, le sang et la chaleur restent au centre du corps. Chaque «petit bout qui dépasse» crée une perte de chaleur considérable. C’est pourquoi les espèces vivant dans le froid, comme le béluga et le narval, ont tout avantage à ne pas avoir trop de ces «petits bouts qui dépassent». C’est un moyen de conserver sa chaleur là où c’est important, tout simplement. Alors pour la nageoire dorsale… on repassera!

5. Un triste passé de chasse aux sorcières

Ce dernier point n’est pas le plus amusant, mais il fait partie de notre histoire.

Dans les années 20, les bélugas ont été victimes d’une chasse absurde et impitoyable. On les accusait de manger tout le poisson de l’estuaire, une situation bien embêtante pour les pêcheurs. Les autorités de l’époque ont alors cru bon de remédier à la situation en ouvrant la chasse aux bélugas. Les chasseurs pouvaient échanger la queue de leur proie contre une compensation monétaire de 15$ (véritable fortune à l’époque!). Le reste de la carcasse n’était pas nécessairement utilisée…

On estime que près de 1000 individus étaient tués chaque année à cette époque. Ce n’est que bien plus tard qu’on a constaté notre erreur: en fait, la population du St-Laurent ne s’intéresse presque pas aux poissons que les humains pêchent. Ils se nourrissaient de plus petits poissons, comme des éperlans et capelant, ainsi que d’une multitude de crustacés et mollusques vivant au fond de l’eau.

La diminution de la quantité de poissons était en fait attribuable… aux humains; surpêche, pollution, etc.

On estime la population actuelle entre 700 et 900 bélugas dans le St-Laurent, contre un estimé de 10 000 avant la période de chasse. Notre béluga est aujourd’hui reconnu comme étant menacée. Il fait d’ailleurs l’objet de plusieurs plans de rétablissement impliquant le Québec, mais également le Canada.

Espérons que l’avenir lui sera profitable!


Découvrez les secrets fascinants du béluga du St-Laurent ! Dans cet article, nous vous présentons 5 faits incroyables sur cette espèce de baleine blanche typique du Québec!
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Audrey Martel

Audrey Martel est une biologiste diplômée de l'Université de Montréal. Elle se passionne pour les plantes et champignons comestibles, le comportement animal, les liens entre les espèces dans les écosystèmes, et la sensibilisation à la protection de la nature.

6 réflexions au sujet de “5 faits surprenants sur le béluga du St-Laurent”

  1. Très intéressant, instructif et agréable la façon de présenter.
    Étonnant les points communs entre nous et les  » bélufilles »
    J’ai beaucoup aimé et en redemande . Merci

    Répondre
  2. Vous avez une façon tellement originale et intéressante de nous décrire
    ce touchant mammifère. Merci de nous partager vos recherches, c’est
    très apprécié.

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