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Le «snowbird» préféré du Québec: le monarque

Le «snowbird» préféré du Québec: le monarque 🦋🧡

Sans conteste le papillon le plus connu au Québec (et sans doute un des plus jolis aussi!), le monarque est l’un de nos insectes les plus appréciés. C’est beau, ça ne pique pas, et ça ne fait pas de grabuge. Mais, connaissez-vous vraiment bien ce papillon? Bien sûr, on connait les grandes lignes: il va au Mexique l’hiver, il mange de l’asclépiade… On en parle quand même souvent, après tout!

Mais saviez-vous que ce ne sont pas tous les individus qui entreprennent la grande migration? Que seule la chenille dépend de l’asclépiade? Que vous pouvez identifier les mâles et femelles facilement?

Il y a tant de choses fascinantes à propos de cette vedette de l’été que l’on ignore! Heureusement, vous êtes tombés sur cet article! 😉

La grande migration: pas pour tous!

On sait déjà que le papillon monarques passe la saison froide au Mexique. Toutefois, ce qu’on ignore souvent, c’est que durant l’été, l’adulte ne vit que de 2 à 6 semaines. Il sort de son cocon, se reproduit, et meurt. Tel est le cycle de vie de plusieurs papillons: pas le temps de niaiser, on fait des bébés, on profite un peu de la belle saison, puis boum! C’est fini. (Je pourrais faire plein de blagues douteuses sur le fait que c’est un bon moyen pour ne pas se faire demander «MAMAAAAAN, qu’est-ce qu’on mange pour souper!??… Mais je vais me retenir!)

Revenons à nos papillons en hiver… Contrairement à d’autres espèces, dont les chenilles ou chrysalides peuvent passer l’hiver en hibernation, les monarques ont choisi la stratégie de la migration.

Comment est-ce possible avec quelques semaines à vivre?

Il y a plusieurs générations de monarques tout au long de l’été, mais la dernière à éclore vivra non pas quelques semaines, mais bien 7 mois! À l’instar de plusieurs oiseaux et retraités, cette génération partira vers le sud et voyagera de 4 000 à 5 000 kilomètres pour rejoindre les forêts du Mexique. Cette même génération amorcera le voyage de retour en mars et pourra alors donner naissance à de nouveaux papillons à la vie plus courte.

Il faut savoir que le papillon qui migre vers le Mexique est immature sexuellement. Il ne peut donc pas se reproduire. Il arrive à destination aux alentours du 1er novembre, soit juste à temps pour le Dìa de los muertos, une fête culturelle très importante pour les Mexicains. Le monarque a donc, vous vous en doutez, une certaine importance là-bas aussi.

Monarques en dormance au Mexique. Photo: Giovanirvp

C’est vers la fin de l’hiver seulement qu’il pourra se reproduire, avant d’entreprendre son voyage de retour… que la femelle fécondée entreprend seule! Eh oui, le mâle ne cherche pas à revenir… Je suis convaincue que c’est par paresse! Le fait de mourir avant le départ n’est pas une excuse, messieurs!

Les femelles ne reviennent pas jusqu’au Québec cependant. Elles vont parcourir une partie du chemin, pondre sur une jeune pousse d’asclépiade et laisser les prochaines générations poursuivre le long chemin. Les monarques progressent ainsi, de génération en génération, jusqu’en juin, mois de leur retour au Québec.

Je ne sais pas pour vous, mais moi, je voudrais être un monarque de juillet ou d’août… leur vie me semble bien plus facile!!

Je sais que cette carte ne montre pas tout à fait le Québec, mais avec un peu d’imagination, vous arriverez à mettre la bonne couleur dans le Canada 😉

L’asclépiade, une plante essentielle

Il existe plusieurs espèces d’asclépiades qui font des fleurs magnifiques. Cependant, la présence du latex toxique à l’intérieur (substance qui ressemble à la colle blanche pour bricolage, mais en vraiment plus collant!) rend les gens mitigés quant à leur présence. Les enfants qui reviennent tout collés de leur session de jeu et les animaux domestiques qui risquent de s’empoisonner: deux bons arguments pour passer la tondeuse sur ces «mauvaises herbes».

Pendant longtemps, on ne savait même pas que notre papillon préféré dépendant de ces asclépiades, alors, on les enlevait, tout simplement.

Maintenant, on sait que le monarque pond sur ces plantes et que sa chenille, qui éclot en 12 jours, se nourrira de cette plante durant deux semaines. La métamorphose en papillon lui permet de quitter l’asclépiade pour se nourrir de nectar: à ce moment, il n’est pas trop regardant sur la sorte de fleur et ne dépend plus de sa plante hôte. Il devra cependant y retourner pour y pondre ses œufs et compléter son cycle de vie.

Durant l’hiver, lorsqu’il se fait bronzer loin du froid québécois, le monarque cesse de s’alimenter. Il ne fait pas grand-chose durant ces quelques mois d’hivernage, et comme il ne se reproduit pas durant cette période, pas besoin d’asclépiade.

MAIS! C’est différent pour le retour. Comme plusieurs générations se succèdent au printemps lors de la remontée de l’Amérique du Nord, les monarques DOIVENT avoir des asclépiades où pondre tout au long de leur route migratoire… Et c’est là le problème! Si ici, nous avons compris l’importance de cette plante mal aimée, ce n’est pas le cas partout… Il y a plusieurs «trous» dans cette supposée route, et c’est une des raisons du déclin des monarques. Les changements climatiques et la disparition des forêts dans la zone d’hivernage sont également des défis pour notre beau papillon.

Monsieur, madame?

Un fait amusant sur le monarque: il est très facile de savoir si c’est un mâle ou une femelle. Il suffit de pouvoir l’observer de suffisamment près…

Le mâle a des taches noires sur les ailes postérieures qui servent à émettre une odeur particulière pour attirer les femelles. Elles sont subtiles, mais quand on sait quoi regarder, on ne voit plus que ça! Pour vous aider à localiser ces taches, repérez sur l’aile du bas les lignes noires qui prennent leur origine au niveau du corps du papillon. Il y en a jusqu’à trois, dépendamment de la position des ailes du spécimen que vous observez. La nervure qui nous intéresse est celle du milieu (souvent la plus foncée). Suivez son tracé qui descend vers le milieu de l’aile jusqu’à la bifurcation. Vous suivez alors la ligne qui continue son chemin vers le bas (le derrière du papillon), et vous trouverez (ou non!) une tache qui semble épaissir la ligne sur un ou deux millimètres. Si vous voulez vous peter les bretelles, vous dites que vous avez trouvé les «androconies» et que c’est donc un mâle!

Exercez-vous: trouvez le mâle et la femelle!

Chenille et asclépiade

Avant de parler de poison, laissez-moi vous dire ceci: il s’écoule maximum deux semaines entre l’éclosion de l’œuf et la fabrication de la chrysalide. Deux semaines pendant lesquelles la chenille mange pratiquement en continu et passe de 2 millimètres à 50 millimètres. Deux semaines durant lesquelles elle gagne du poids jusqu’à faire 2 700 fois son poids initial…

Je ne sais pas pour vous, mais… Deux semaines à manger de la poutine, puis deux autres à se reproduire, je m’éteindrais heureuse!! 😀 Quelle vie de rêve… courte, mais quand même…!

Un peu de sérieux! La toxicité du monarque, comment ça marche?

Comme vous l’avez peut-être déjà entendu dire, la chenille accumule les toxines du latex de l’asclépiade. À mesure qu’elle se nourrit et grandit, la toxine s’installe dans les tissus de cette larve de monarque (oui, oui, la chenille, c’est une larve d’insecte!). Ceux-ci resteront présents dans l’individu tout au long de sa vie, empoisonnant les prédateurs qui oseraient dévorer nos beaux monarques. Mais, pour les plus curieux qui veulent connaître le pourquoi du comment, plusieurs questions peuvent vous venir en tête…

Est-ce que le monarque souffre de ce poison? Non! Il n’est pas affecté par celui-ci.

Donc, tout le monde est sensible à la toxine, sauf le monarque…? Non plus… en fait, les mammifères et oiseaux sont beaucoup plus réactifs que les lézards ou grenouilles, par exemple. La grosseur de l’animal et la quantité qu’il mange influence aussi la proportion de poison, et donc la réaction. Un ours ou une petite musaraigne n’auront clairement pas la même intensité de réaction à une quantité égale de monarque!

Donc, si mon chien mange un monarque, il va mourir!!! NON ! Bien sûr que non! Mais il risque d’être malade et de ne plus jamais en remanger. En fait, le poison des monarques fonctionne sur le principe de l’apprentissage. Si vous avez déjà fait une indigestion après avoir mangé des crevettes, et que vous n’est plus capable d’en sentir l’odeur sans avoir un haut-le-corps… vous comprenez de quoi je parle. Même chose si votre première brosse était au Fireball! (À noter que je ne parle pas d’expériences personnelles!). Un oiseau qui a mangé un papillon orange et en a eu pour des heures à s’en remettre… ne s’y risquera plus!

Ok… donc ça veut dire que chaque raton, chaque crécerelle, chaque mouffette… doit en manger au moins une fois? C’est à peu près ça… certains parents peuvent l’enseigner aux bébés, mais oui, en règle générale, beaucoup, beaucoup de monarques doivent se sacrifier pour le bien commun!

Et la chenille, ça fonctionne comment? C’est un peu différent. Comme elle accumule la toxine tout au long de sa croissance, les plus jeunes ne sont pas vraiment toxiques. Toutefois, la couleur de la chenille est très reconnaissable, les prédateurs peuvent donc apprendre à les reconnaitre, tout comme les adultes, grâce aux lignes jaunes, blanches et noires qui…

Wow, minute papillon! Il est où l’orange? Comment le raton va savoir que la chenille est pas bonne? Il va devoir y goûter… et apprendre à la reconnaître aussi!

Ok, donc chaque animal doit manger un papillon, ET une chenille? Mais… il n’en restera plus!!! En fait… moins de 10% des œufs pondus arriveront au stade adulte. La prédation sur les jeunes chenilles est très grande puisqu’elles ne sont pas «encore» empoisonnées suffisamment… Ça paraît terrible de dire qu’autant de monarques se font dévorer mais… vous savez… c’est ça, l’équilibre de la nature! Les animaux insectivores doivent bien se nourrir aussi!



"Découvrez pourquoi le papillon monarque, ce fameux 'snowbird', est si cher aux Québécois. De sa migration spectaculaire à son charme coloré, tout est révélé ici
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Audrey Martel

Audrey Martel est une biologiste diplômée de l'Université de Montréal. Elle se passionne pour les plantes et champignons comestibles, le comportement animal, les liens entre les espèces dans les écosystèmes, et la sensibilisation à la protection de la nature.

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