Dans la plupart des langues du monde, certains mots sont issus de la fusion ou de l’agglutination de mots simples. En linguistique, on qualifie ce processus d’univerbation. Cette transition vers un nouveau mot peut se faire graduellement. Par exemple, le mot « bonhomme » est en voie de devenir un univerbé. On observe la fusion évidente de « bon » et « homme », mais lorsqu’on l’emploie au pluriel, on accorde encore souvent les mots séparément. On ajoute le « S » à l’adjectif « bon » qui n’est pas invariable dans « les bonshommes ».
Bien que nous utilisions des univerbés de façon courante dans notre vocabulaire, on ne s’en rend que rarement compte. Certains sont évidents et d’autres le sont moins.
En voici quelques-uns :
Les plus communs
Bonjour – Bonsoir
Fusion simple de l’adjectif « bon » et des noms « jour » ou « soir ». Note : Certaines personnes utilisent l’expression « bon matin ». Cependant, il s’agît d’une traduction libre de good morning et n’est pas de bon usage en français.
Pourquoi
De « pour » et « quoi ». Le sens ne change pas. Les deux mots de cette expression se sont simplement fusionnés avec le temps pour n’en faire qu’un seul.
Madame – Mademoiselle
De l’adjectif possessif « ma » et « dame » qui vient du terme latin domina qui veut dire « maîtresse de maison » ou par extension, « femme mariée ».
Par opposition, on utilise « ma » et « demoiselle » pour désigner une femme jeune ou célibataire. Autrefois, on réservait ces titres à la noblesse.
Monsieur
Ce mot courant est composé de l’adjectif possessif « mon » et du mot « sieur ». Sieur est un dérivé du mot Seigneur, comme dans le mot « Monseigneur ». Ce titre est encore courant au sein de la religion catholique, notamment lorsqu’on s’adresse à un évêque. À l’origine, on réservait cette appellation aux hommes nobles ou de haut rang avant de l’élargir aux hommes de toutes conditions, à titre de formule de politesse.
Gentilhomme
Celui-ci est assez simple à comprendre. On a simplement collé les mots « gentil » et « homme » ensemble. Cependant, par « gentil » on n’entend pas nécessairement bon ou sympathique. On désigne plutôt un homme de naissance noble. Le terme « gentillefemme » existe également, mais son usage est encore plus rare que la forme masculine.
Vinaigre
Par définition, du vinaigre c’est simplement du vin aigre ! Plus précisément, il s’agit de vin qui est aigri par la production spontanée ou provoquée d’acide acétique pour en faire un condiment.
Pourboire
À l’origine, l’argent qu’on laissait aux serveurs et aux serveuses servait à leur permettre eux aussi, de s’offrir un breuvage. On leur laissait littéralement de l’argent pour boire !
Malchance
En plaçant le préfixe « mal » (synonyme de mauvais) devant « chance » on en inverse le sens.
Portemonnaie
Formé du verbe « porte » et du nom « monnaie ». On fusionne ces deux mots pour désigner un dispositif qui sert à porter la monnaie !
Vaurien
C’est quoi un vaurien ? C’est un individu de peu de valeur. Autrement dit, il ne vaut rien !
Les plus surprenants
Déjeuner
Ce mot est à l’origine d’un sempiternel débat. Les Québécois l’utilisent pour désigner le premier repas de la journée, prit le matin, tandis que pour les Français c’est au deuxième repas, celui du midi, que l’on déjeune.
Toutefois, le débat est assez facile à trancher lorsque l’on s’arrête à comprendre le sens du mot en le décomposant.
Le mot d’origine « desjeûner » est composé du verbe « jeûner » qui signifie s’abstenir de manger, auquel on ajoute le préfixe « des ». Une fois assemblé, le mot signifie cesser le jeûne que nous pratiquons en dormant. Lorsqu’on mange pour la première fois de la journée, généralement le matin, on cesse de jeûner… On déjeune !
Conclusion : L’usage québécois est correct.
En France, on désigne le premier repas par l’expression « petit-déjeuner » et on déjeune lorsqu’on mange pour la deuxième fois, le midi. Il faut admettre que cela ne fait pas vraiment de sens !
En anglais, on retrouve l’univerbé « breakfast », composé de « break » qui signifie briser ou arrêter et « fast » qui désigne jeûne. Et eux aussi, font ça le matin !
Gendarme
Ce terme courant en Europe est rarement utilisé au Québec. On l’utilise généralement que lorsque l’on parle de la police fédérale canadienne, la Gendarmerie Royale du Canada. Les gendarmes sont simplement des gens d’armes ou encore, des gens armés.
Biscuit
Techniquement, un biscuit est une pâte qui a été cuite à deux reprises pour la durcir. Le terme « bis » signifie deux fois. Si on l’accole à « cuit », on comprend que l’univerbé signifie « cuit deux fois » !
Note : Autrefois, on orthographiait le mot « bescuit ». En jargon québécois, on prononce encore parfois le mot de cette façon.
Copain
Le préfixe « co » signifie avec. Comme le co-pilote est celui qui assiste le pilote, le copain est celui avec qui on partage son pain ! Il est un « co-pain » !
Fainéant
Un fainéant est considéré comme un paresseux parce qu’il ne fait rien. Autrement dit, il fait néant (synonyme de rien) !
Alarme
Ce mot est le résultat de la contraction de l’expression « aux armes » ou plus précisément « à l’arme ». Lorsqu’on est attaqué au moyen-âge, c’est la façon appropriée de réagir ! Note : Les premiers à faire cette univerbation sont les italiens avec l’expression « all’arme » que l’on criait aux soldats en situation d’urgence.
Exclusifs au Québec
Montréal
L’unique nom propre de cette liste, est celui de la métropole québécoise ! Il est inspiré de la célèbre montagne que Jacques Cartier baptisa, Mont-Royal. En fusionnant les mots « mont » et « réal » (qui signifiait royal), l’écrivain français François de Belleforest a consacré en 1575, le nom de la plus grande ville du Québec.
Note : Belleforest est aussi un nom propre univerbé 😉 !
Matante – Mononcle
Au Québec, les mots « ma » et « tante » se sont fusionnés pour donner « matante ». On l’utilise tantôt comme un nom commun, tantôt comme un nom propre comme dans : Va demander à Matante Sylvie si elle veut de la poutine ! De la même façon, on utilise le mot « mononcle » au masculin.
Astheure
Parfois orthographié « à c’t’heure », ce mot très fréquent au Québec signifie simplement « à cette heure ». On le dit au lieu d’utiliser le mot « maintenant ».
Accroire
Né de l’union des mots « à » et « croire », un accroire est un mensonge, une histoire fausse que l’on tente de faire croire à autrui ou à soi-même ! Ironiquement, un accroire n’est pas une histoire à croire !
Les univerbations sont des joyaux linguistiques qui démontrent la flexibilité et la richesse du français. Découvrez en juste ici!Partager cette trouvaille!Partager!Envoyer par courrielEnvoyer!
Très intéressant!
Merci!
Et un biscuit n’est pas un gâteau!